Une France attractive dans une Europe dynamique

20 Juillet 2015

Discours de Marc Ivaldi à l'occasion du sommet économique Franco Chinois le 1er Juillet 2015.

INNOVONS POUR L’AVENIR, BATISSONS ENSEMBLE

 

 

Europe is back

La croissance économique de l'UE bénéficie actuellement de conditions économiques favorables: maintien des prix du pétrole à des niveaux relativement bas, croissance mondiale soutenue, poursuite de la dépréciation de l'euro, et politiques économiques opportunes.
Sur le plan monétaire, l'impact du programme d'assouplissement quantitatif de la Banque centrale européenne sur les marchés financiers est important et contribue à faire baisser les taux d'intérêt et à renforcer les perspectives d’une amélioration des conditions de crédit. Compte tenu de son orientation globalement neutre dans l'UE, la politique budgétaire soutient également la croissance.
En conséquence, l'UE va voir son PIB réel progresser d’au moins 1,8% en 2015 et de 2,1 % en 2016. Les prix à la consommation vont augmenter, et encore davantage en 2016, en raison du renforcement de la demande intérieure, du rétrécissement des écarts de production, de l'atténuation des effets induits par la baisse des prix des produits de base et de l'augmentation du coût des importations imputable à la dépréciation de l'euro. Les risques de déflation sont définitivement éloignés. Le taux de chômage dans l'UE diminuera cette année, à mesure que l'amélioration de la situation de l'emploi s'étendra aux différents secteurs d'activité. Compte tenu des prévisions annonçant un affermissement de la croissance en 2016, cette tendance va se poursuivre, en particulier dans les pays qui ont réformé récemment leur marché du travail.
Pas étonnant dans ces conditions que selon une étude récente d’Ernst & Young, l’Europe renforce sa position de deuxième zone mondiale pour les investissements étrangers. En 2013 les investissements directs étrangers ont fait un bon de 38% dans l’UE. Pour près de la moitié des chefs d’entreprises, l’Europe est la destination la plus attractive pour les investissements, juste devant la Chine.
Ces résultats sont les réponses de l’Europe à tous les Cassandre qui annonçaient un peu prématurément son effondrement après la crise de 2008. Ces résultats sont le fruit des politiques de stabilisation budgétaire et fiscale, du renforcement des politiques structurelles qui favorisent une économie plus compétitive, qui privilégient une réglementation efficace, qui combat les cartels et les monopoles, qui favorisent la mobilité du capital humain en Europe et finalement qui donne toutes ses chances à l’innovation condition sine qua non de la croissance de demain.
Certes tout ceci ne se fait pas en un jour. En 1957, l’Europe c’était 6 pays et tout le monde parlait le français. A l’heure du café, quand le serveur disait « café ? », tout le monde répondait unanimement en français « Oui merci ». Maintenant, l’Europe c’est 28 pays et à la pause-café, celui-ci voudra un café serré, celui-là un café avec un peu de lait, cet autre un café avec beaucoup de lait mais sans sucre, ou un café avec un peu de lait mais avec du sucre qui n’est pas du sucre, sans compter ceux qui veulent du thé, du thé au citron, du thé avec du lait mais sans sucre ou du thé à la menthe ou du thé de Chine, il y a aussi ceux qui veulent une tisane, un cappucino, un cortado, un express mais aussi un verre d’eau plate, une eau minérale gazeuse et puis il y en a un - je ne vous dirais pas son nom – qui veut un Armagnac (qui comme vous le savez est un breuvage qu’on élève sagement au sud-ouest de Toulouse – ne repartez pas de Toulouse sans en avoir apprécié les charmes).
A l’image d’une pause-café, l’Europe est une tour de Babel politique. Pas facile de prendre des décisions. Ce qui est remarquable, c’est que malgré les critiques, les pertes de temps et les inefficacités en tous genres, l’Europe avance. Ne croyez pas que je me satisfasse de cette situation. Comme beaucoup d’économistes de ma génération, nous appelons les plus jeunes générations à faire le saut vers un vrai fédéralisme en Europe. Et je crois que la jeunesse européenne y est prête. Il nous faut une gouvernance politique plus claire, plus efficace et plus moderne si nous voulons relever les défis économiques et sociaux engendrés par la globalisation des marchés et des industries, par la révolution technologique du tout numérique, par les progrès phénoménaux de la médecine et de la biologie et par les impacts du changement climatique.
Est-ce réaliste de parler ainsi alors que se déroule en ce moment la crise la plus grave qu’ait connu l’EU, avec la sortie possible de la Grèce de la zone Euro. Et bien paradoxalement, je vois dans le déroulement de cette crise, une étape importante dans la maturité de l’Europe. Nous ne sommes plus il y a 5 ans lors de la première crise grecque. Les mécanismes dont nous nous sommes dotés et les décisions de solidarité qui font porter la dette grecque par les Etats européens ont considérablement réduit le risque systémique. De la même manière, je considère comme très positives les discussions engagées par le Royaume-Uni pour éviter un Brexit car elles aboutiront inévitablement à une cohérence plus forte de l’organisation politique européenne.
Quand on a la chance de posséder, sur un territoire relativement réduit à l’échelle mondiale, autant de richesses qui s’appellent Londres, Rome, Amsterdam, Madrid, Stockholm, Paris, Barcelone, Milan, Lisbonne, Prague, Vienne, Toulouse et j’en oublie tant, construire l’avenir européen est une ardente nécessité pour y maintenir la paix.
Dans ce contexte, que dire de la France ? Je n’hésite pas un instant à prendre à mon compte ce que John Chambers, le Président de Cisco, numéro un mondial des équipements de réseau disait de la France en février dernier :

La France est « the next big thing »

Et John Chambers d’ajouter : « Je parie sur la France. La France est en train de basculer. Il est temps d’investir. » Je vous invite à suivre son conseil et même à le devancer et je vais tenter de vous dire pourquoi.
La France est le deuxième marché en Europe avec plus de 65 millions d’habitants, avec une démographie dynamique puisqu’elle occupe la seconde place européenne pour le taux de fécondité. Deuxième puissance économique de l’Union Européenne, 6ème exportateur mondial de biens et 4ème  exportateur mondial de services, la France est la 1ère destination européenne pour les investissements étrangers dans l’industrie et se place 4ème au rang mondial et seconde en Europe en termes de stock d’investissement direct étranger.
La France, c’est aussi le 1er réseau routier d’Europe, le 2nd aéroport pour les passagers et le 1er aéroport de fret avec Roissy-Charles de Gaulle, le 2nd plus performant réseau ferré à grande vitesse. La France, c’est surtout un capital humain qualifié et productif, qui produit un chef d’entreprise comme Mohed Altrad, le PDG d’Altrad, désigné comme World Entrepreneur of the Year. La France investit dans son système éducatif plus que la plupart des grands pays européens. Elle investit aussi dans le bien-être de sa population : 3ème au rang mondial pour l’adéquation des infrastructures de santé aux besoins de la société et 6ème au rang mondial pour l’espérance de vie à la naissance. Elle promeut une offre culturelle qui explique en grande partie sa place de 1ère destination touristique mondiale.
La France a massivement investit dans la recherche et l’innovation. Sixième au rang mondial pour le dépôt de brevets internationaux, la France est aussi le 1er pays d’Europe dans le top 100 des entreprises les plus innovantes du monde selon Thomson Reuters. Les Programmes d’investissement d’avenir dotés de 47 Mds € contribuent à la croissance des secteurs prioritaires stratégiques. Le crédit d’impôt recherche est une incitation fiscale sans équivalent en Europe : un crédit de 30 % des dépenses de R&D jusqu’à concurrence de 100 M€ et de 5 % au-delà de ce montant.
Selon une étude récente de KPMG, la France est dans une position intermédiaire pour les coûts d’exploitation, plus chère que le Royaume-Uni mais bien moins chère que l’éternelle concurrente, l’Allemagne. Dans ces conditions, même si le coût du travail reste en France relativement élevé par rapport à d’autres pays européens, l’attractivité de la France s’est récemment considérablement améliorée dans le sillage du rebond de l’investissement étranger en Europe, avec une progression de 18% des implantations étrangères en France qui placent la France en 3ème position européenne avec 608 projets en 2014. La France demeure ainsi la 1ère destination pour les implantations industrielles. La France continue d’attirer les investissements dans les fonctions dites stratégiques, notamment dans les fonctions de R&D et d’ingénierie.
Les investissements de nos amis chinois ont atteint des records en Europe cette année, mais la France a fait bonne figure avec des investissements emblématiques : l’entrée de DongFeng dans le capital de PSA, le rachat de Club Med par Fosum, la participation de CIC dans le pôle exploration de GDF Suez, mais aussi l’installation par Synutra de sa première usine européenne de lait en poudre en Bretagne.
Au total, selon l'Agence française des investissements internationaux, environ 240 investisseurs chinois avaient déjà fait le choix de la France fin 2013, représentant près de 10.000 emplois. Si l'on ajoute les 70 filiales d'entreprises originaires de Hong Kong, ce sont au total 16.000 salariés qui travaillent pour des entreprises de Chine ou Hong Kong. Avec un tel montant d'investissement, la France semble être une destination de choix pour les entreprises chinoises. Sur la période 2000 – 2014, la France se classe au 3ème rang des pays européens par le stock d’investissement chinois.
Toutefois permettez-moi de vous murmurer un conseil : investissez dans :

Toulouse
L’obtention du prix Nobel d’économie à Jean Tirole, Professeur à Toulouse School of Economics et Président de la Fondation Jean-Jacques Laffont, offre à Toulouse une visibilité nationale et internationale. Il vient également mettre en lumière la qualité de la recherche en France et notamment à Toulouse.
Toulouse, c’est la 1ère métropole française en termes de croissance démographique, c’est 14000 personnes qui s’y installent chaque année, c’est la 1ère métropole française en termes de croissance du PIB, c’est la 1ère destination universitaire plébiscitée par les étudiants, c’est la 1ère région européenne en R&D.
Ces réussites passées et actuelles sont moins bâties sur de grandes idées que sur des projets portés par des Hommes. C’est le prix Nobel d’économie 2014, l’implantation du siège social d’Airbus Group ou encore le label “French Tech”.
Pas étonnant alors que l’aéroport de Toulouse, premier aéroport régional à ouvrir son capital à des investisseurs privés, ait attiré l’attention de l’entreprise chinoise Symbiose.
Toulouse sera “Capitale européenne de la Science » en 2018 et pourra montrer comment elle brille dans les domaines de l’innovation industrielle, de l’aéronautique au spatial, de l’agronomie à la médecine en passant par les biotechnologies et le digital.
Comme d’habitude, j’ai été trop long et je vous prie de m’en excuser. Je vous remercie de votre attention, je vous souhaite des échanges fructueux pendant ce sommet économique France –Chine et finalement je vous souhaite un excellent séjour en France et à Toulouse.