Supprimons la PAC pour relancer l’Europe

26 Janvier 2017 Agriculture

Supprimons la politique agricole commune (PAC) du budget de l'Union européenne (UE) et réintégrons-la dans les budgets nationaux (idem pour la politique régionale) pour créer enfin un vrai budget européen centré sur des biens publics ­proprement européens.
Certains de nos problèmes actuels sont de plus en plus européens (sécurité, climat, recherche) et pourtant le budget européen en ces domaines est faible. Beaucoup de gens appellent à un renforcement du budget de l'Union européenne (aujourd'hui de 135 milliards d'euros, 1 % du PIB de la zone euro).
Pourtant, c'est impossible et ­illégitime. Impossible, car il faudrait l'unanimité des 27 pays de l'UE. Or, la plupart des pays du nord de l'Europe refusent. Illégitime, car comment légitimer une augmentation des dépenses et ressources pour faire plus d'Europe alors même que le budget actuel de l'Union est aux deux tiers consacré à des dépenses non européennes non efficaces (PAC et politique régionale) ?

Aucun risque de disette

Un budget de l'Union européenne, surtout s'il est faible, devrait se concentrer sur des biens publics européens. Devraient être reléguées aux budgets nationaux les politiques ne concernant pas l'ensemble de l'Europe (principe de subsidiarité). Or, c'est le contraire. Un tiers du budget actuel de l'UE est consacré à la politique ­agricole commune. Or, la PAC n'a aujourd'hui aucune utilité européenne : il n'y a aucun risque de disette en Europe. La PAC sert essentiellement à financer la moitié du revenu des agriculteurs européens (sans principe de justice sociale). Il n'y a rien ici d'européen.

L'aide au revenu des ­agriculteurs relève purement de la politique des Etats. C'est pourquoi il faut supprimer les subventions européennes à la PAC. Un (mauvais) argument cynique a longtemps consisté à dire que les agriculteurs votant massivement pour l'Europe, il fallait continuer la PAC. Ce n'est plus vrai depuis 2005 en France ; en Angleterre, la grande majorité des agriculteurs a voté pour le Brexit.

Puisque les agriculteurs européens votent massivement contre l'Union européenne et qu'ils la critiquent à chaque crise agricole, il n'y a plus aucune raison politique à maintenir la PAC. Renationalisons donc la politique agricole : aux agriculteurs de convaincre leurs Parlements nationaux qu'il faut les subventionner.

Libérer 100 milliards

Un autre tiers du budget de l'Union va à la politique régionale (transferts vers les régions le plus pauvres de l'UE de fonds structurels, sous forme de financements d'infrastructures...). Or il n'y a pas de preuve que ces fonds soient utiles. La Grèce, le Portugal et l'Espagne en ont bénéficié massivement depuis trente ans : cela ne les a pas empêchés de sombrer dans la crise financière et la corruption associée. En outre, à de rares exceptions (réseaux électriques ou numériques), ces infrastructures financées par l'UE n'ont d'utilité que locale (ponts, hôpitaux) : elles devraient être financées soit par les Etats, soit par les régions, mais pas par l'Europe.

La suppression des financements de la PAC et des fonds structurels libérerait 100 milliards d'euros par an dans le budget européen qui pourraient être alloués à des dépenses vraiment européennes - et demandées par les électeurs européens. Une véritable politique européenne de contrôle des frontières de l'UE et des migrations coûterait autour de 30 milliards d'euros (c'est 35 milliards de dollars aux Etats-Unis). Le financement de la recherche-développement sur la transition énergétique, des universités européennes d'excellence ou d'un Erasmus généralisé soutiendrait à la fois l'Europe et son avenir (beaucoup plus que la PAC).

La voix de la France sera capitale car elle a jusqu'ici toujours mis son veto à la réduction drastique du financement de la PAC. Avec le début des négociations budgétaires européennes (pour l'après-2020), il est enfin temps que la France prépare l'avenir de l'Europe plutôt que de s'accrocher à une PAC dont même nos agriculteurs ne veulent plus.

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